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Regarder en face les salariés victimes de violence conjugale



Un regard qui en dit long


Je me souviens du récit de mon ami Jean, il y des années de cela, sur sa rencontre avec Emilie. Alors qu'il exerçait au service RH dans une usine, Jean avait remarqué les ecchymoses récurrentes sur le visage d'une jeune femme, intérimaire. Un jour, il a osé brisé le silence à la vue de son oeil au beurre noir. Et plutôt que de détourner le regard, il avait choisi d'ouvrir une porte avec ses mots, bienveillants et droits au but : "si tu as besoin d'aide, sache que je suis là". Avec sa compagne Marie ils avaient ensuite offert refuge à cette femme, l'accompagnant dans ses démarches pour fuir le compagnon violent qui menaçait sa vie, brisant ainsi le cycle de la violence conjugale qui l'enserrait. J'ai eu l'honneur de rencontrer Emilie lors du mariage de mes amis et son sourire retrouvé témoignait de l'impact de leur geste.

À cette époque, je me suis interrogée : qu'aurais-je fait à la place de Jean ? Aurais-je eu le courage de m'impliquer ainsi, malgré la peur des risques de représaille pour ma famille et moi ? Et ces questions m'ont tarraudée. Longtemps.


Des chiffres alarmants


En France, près de 90% des victimes sont des femmes. En 2023, 270 000 d'entre elles ont déposé plainte.

Dans chaque entreprise, des collaborateurs vivent un combat silencieux. Ce sont des femmes salariées, en grande majorité, qui, chaque jour, tentent de dissimuler des blessures invisibles derrière un sourire de façade, une performance intacte ou des absences répétées.

La violence conjugale s’est assise à côté de vous en entreprise.


Un tabou à lever, un enjeu humain, social et économique


Les violences conjugales ne sont pas un sujet privé. Elles peuvent affecter la concentration, la santé et la productivité. L’absentéisme, le turnover ou au contraire, le sur-investissement sont souvent les premiers symptômes visibles. Un employeur qui ne se questionne pas et choisit d’ignorer cette réalité passe à côté d’un levier puissant de bien-être au travail, d'engagement et de fidélisation.


Un salarié soutenu est un salarié plus engagé


En 2022, une étude de la Fondation FACE révélait que 91 % des dirigeants interrogés pensent que l’entreprise a un rôle à jouer dans la lutte contre les violences conjugales, mais que seuls 16 % ont mis en place des dispositifs concrets. L’écart est frappant.


L'entreprise, un refuge potentiel ou un angle mort ?


Le lieu de travail représente souvent le dernier lien social extérieur, le dernier lieu de répit pour ces victimes.

Mais comment une entreprise peut-elle faire la différence entre un simple retard et un appel à l’aide silencieux ? Comment ne pas détourner le regard sans pour autant outrepasser son rôle ?


Certains employeurs ont déjà pris la mesure du problème et ont décidé d’agir.

  • Le groupe Kering, pionnier sur le sujet, a mis en place des formations pour ses collaborateurs afin de détecter les signes de violences et orienter les victimes vers un accompagnement spécifique.

  • Carrefour, en partenariat avec SOS Femmes 13, forme ses managers pour les sensibiliser à ces situations, tandis que Oui Care a créé un fonds de solidarité alimenté par ses bénéfices, permettant de financer des frais juridiques ou d’hébergement temporaire.


Un cadre légal en évolution

La loi du 28 février 2023 a introduit des mesures permettant d’accompagner les victimes en milieu professionnel :


  • Un congé spécifique pour les victimes de violences conjugales, leur permettant de s’absenter sans perte de salaire.

  • L’adaptation du poste de travail, incluant des aménagements d’horaires ou des mutations géographiques pour protéger les salariés en danger.

  • Des dispositifs d’alerte internes pour signaler discrètement une situation préoccupante.


Des acteurs de la sphère associative, médicale, psychologique, juridique, et sociale entourent l'entreprise et peuvent collaborer avec celles-ci afin de mettre en place un soutien, un aiguillage de la personne concernée vers les structures compétentes.


Agir ensemble. L'entreprise, actrice clé du changement


Mobilisons le "S", non pas de Superman, mais celui de la "Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE)".

Au-delà de la Qualité de Vie et des Conditions de Travail (QVCT), inclure la lutte contre les violences conjugales dans le volet social de la politique RH de l'entreprise, au coeur de la RSE, permet de lui donner une véritable dimension majuscule, à la hauteur de l'enjeu de la protection des salariés. C'est contribuer à un impact humain responsable, avec une approche holistique et systémique du "bien-être" au travail.


S’ y engager ne signifie pas se substituer aux associations ni aux pouvoirs publics. Mais c'est offrir un cadre sécurisant, des ressources et un soutien logistique qui peut sauver des vies. L’engagement sociétal d’une entreprise ne se mesure pas seulement en engagements environnementaux ou en actions ponctuelles. Il repose sur une prise de conscience durable : protéger ses collaborateurs, c’est protéger son entreprise.


Alors, que peut faire votre entreprise dès aujourd’hui ?


En bref, des exemples d'actions concrètes à mettre en place :


  • Sensibilisation et formation des directions, RH, managers et salariés : Organiser des sessions de formation pour savoir détecter les signaux faibles et comment réagir et agir avec bienveillance.

  • Mise en place de référents : Désigner des référents garants de la politique interne de prévention et de soutien au sein de l'entreprise, formés pour accompagner et orienter les victimes vers des structures adaptées.

  • Aménagement du temps de travail : Proposer des aménagements d'horaires ou de postes pour les victimes, afin de faciliter leurs démarches ou assurer leur sécurité.

  • Partenariats avec des associations : Aiguiller vers des solutions adaptées et collaborer avec des associations spécialisées pour offrir un soutien psychologique et juridique aux victimes.

  • Communication interne : Afficher clairement l'engagement de l'entreprise contre les violences conjugales et diffuser les ressources disponibles pour les victimes.

  • Créer un fonds de soutien, à l’image de Oui Care, pour proposer des aides financières d’urgence.



Et vous, quelle porte allez-vous ouvrir aujourd'hui ?

Votre entreprise a-t-elle les outils nécessaires pour protéger ses salariés victimes de violences ?

Vous ne savez pas par où commencer en entreprise pour concrétiser le soutien à vos collaboratrices et collaborateurs, victimes de violence intrafamililale ?


Discutons-en, je peux vous accompagner dans cette démarche RSE. Parce que chaque action compte.


Sources :



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